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Un dialogue inhabituel: cybernétique et émotions. Gregory LAMBRETTE
Pour la Revue Hypnose & Thérapies Brèves n°28.
Une des avancées importantes de l’approche stratégique brève concerne la prise en compte du travail avec les émotions. Gregory Lambrette situe cette évolution dans une perspective historique, pour nous emmener loin des conceptions pionnières initiales, sans pour autant s’en couper.
LIMINAIRES
Au même titre que les comportements et les cognitions, les émotions sont l’un des composants essentiels de nos interactions. Principalement déclenchées par nos croyances et notre perception de la réalité, les émotions influent sur nos agissements (ou non-agissements) et déterminent (ou empêchent) pour beaucoup nos réactions. On peut feindre de les ignorer et tenter de feinter avec elles en privilégiant la seule raison.
L’on peut également se focaliser exclusivement sur elles et en être aveuglé au point de ne plus voir d’autres paramètres tout aussi essentiels. Mais les négliger serait nier un déterminant fondamental de nos actions et la substance même de nos relations. C’est que si la vie n’est pas logique (au sens traditionnelle du terme s’entend) et la raison auto-suffisante, nous savons, à l’instar de Pascal, que le cœur a ses raisons que la raison ne connaît point.
Dans le champ de l’intervention sociale, nous pensons que ces émotions (qui inévitablement traversent aussi bien les professionnels de l’aide que leurs bénéficiaires potentiels) ne sont ni bonnes ni mauvaises en elles-mêmes. Elles ne le sont qu’en fonction d’objectifs (pédagogiques, thérapeutiques, etc.) que l’on peut co-construire idéalement en tant qu’intervenant avec les bénéficiaires de nos services.
Cette assertion pose d’emblée l’idée que nous agissons en fonction de buts que nous nous assignons. Et qu’à cet effet, nous procédons par régulations successives, tant avec nous-même qu’avec notre environnement, afin d’atteindre les finalités visées. Cette vision empruntée au modèle cybernétique (que nous développerons par ailleurs) doit nous permettre d’introduire le lecteur à la thérapie interactionnelle et stratégique de Palo Alto.
En effet, cette approche nous apparaît pertinente pour le sujet qui présentement nous occupe. C’est que celle-ci place la relation et ce qu’elle charrie (à savoir les valeurs, les croyances, les émotions, etc.) au cœur des processus homéostatiques comme à ceux menant au changement. L’émotion y apparaît (davantage aujourd’hui qu’hier il est vrai) en tant qu’information pertinente dont l’intervenant doit pouvoir tenir compte pour « calibrer » son intervention et, autant que faire se peut, la rendre plus efficace.
Aussi nous introduirons dans cet article le lecteur au paradigme cybernétique et à la place qu’y occupe le concept de « feed- back positif » dans le maintien des problèmes humains. Même si l’on accole rarement « émotion » et « cybernétique » (deux termes en apparence antagoniste tant l’idée de « l’homme machine » que l’on a prêté au modèle cybernétique semble exclure ce grain de sable que revêtent, parfois et pour certains, sentiments et émotions), nous pensons que l’idée centrale développée par le « modèle cybernétique » et repris par la thérapie interactionnelle et stratégique de Palo Alto, à savoir tenir compte des effets de ce que l’on fait ou de ce que l’on ne peut s’empêcher de faire (et qui peut à sa manière entretenir le problème), constitue une information fondamentale (qui plus est lorsque la chose est éclairée par les émotions) afin de rendre les problèmes plus accessible à une solution et par là-même au changement.
GRÉGORY LAMBRETTE
Psychologue, psychothérapeute et associé de recherche à CICSeS (Belgique-France-Suisse). Président de l’Association luxembourgeoise de thérapie interactionnelle et stratégique (Altis) au Grand-Duché de Luxembourg.
Formateur à l'Institut UTHyL à Nancy et au CHTIP Collège d'Hypnose et Thérapies Intégratives de Paris
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